C’est un petit bout de bonne femme toute menue, dans sa petite robe à bretelles et ses ballerines, qui se présente à nous, intimidée, mercredi matin dernier.
Nous ce sont Maïté et moi, qui officions en tant que jury pour l’épreuve finale destinée à valider pour 13 candidats un titre professionnel d’employé administratif et d’accueil (je crois que c’est le nom exact du titre).
Pour en arriver là, Floriane a travaillé d’arrache-pied pendant 17 mois, dans un centre de reconversion professionnelle, pour pouvoir exercer un nouveau métier suite à un accident de vie. Un accident de pas de bol et un accident que l’on ne peut pas ne pas remarquer. 17 mois pas toujours faciles, au sein d’une « classe » de personnes dont le point commun est la RQTH (reconnaissance en qualité de travailleur handicapé). Elle est partie de rien pour apprendre un métier qui soit compatible avec les contraintes infligées par sa différence.
Bien sûr, elle se présente à nous et elle est stressée. Les épreuves écrites, produites l’avant veille et destinées à valider un bon niveau de compétences en la matière et à garantir une employabilité immédiate, sont devant nous, sur le bureau. Elles sont excellentes. Nous le lui disons d’emblée, pour la détendre.
Nous lui demandons de nous parler de ce métier qu’elle s’apprête à exercer, de son stage, de ce qu’elle en a retiré et son visage s’illumine. Elle rayonne. Son sourire est éclatant. Elle s’exprime avec pertinence, le mot juste, et, faisant fi de sa timidité nous regarde bien en face. Le boulot, l’avenir, c’est sérieux et elle sent que nous jury nous attendons d’elle cette posture- là. Une posture d’une professionnelle de l’accueil, qu’il soit physique, téléphonique, et une bonne compétence dans la réalisation des travaux administratifs indispensables dans toute collectivité de travail.
Assez vite nous lui faisons comprendre qu’elle a fait le bon choix dans ce nouveau métier pour lequel elle semble parfaitement bien à sa place. Nous l’encourageons à tout de suite chercher une place, pourquoi pas en intérim, août et son cortège de titulaires à remplacer arrive à grands pas, elle est brillante, cette jeune Floriane, brillante et déterminée. Elle n’est pas encore tout à fait convaincue qu’elle dispose d’un vrai potentiel mais, passionnée par ce métier qu’elle a découvert, elle veut en découdre.
Et elle nous dit en passant : « merci de m’avoir encouragée ; Pôle Emploi m’a refusé la formation d’agent d’accueil« .
Quand on regarde plus de 2 minutes et demi, on a déjà oublié la souffrance qui a sculpté son visage, les douleurs qu’elle a dû subir pendant des mois, des années ; on ne voit plus que son sourire, son enthousiasme, sa volonté de travailler, de réussir et de se dépasser. On voit que dans une entreprise elle sera une excellente hôtesse d’accueil.Et elle saura évoluer, grandir encore.
Le visage et le scalp de Floriane ont été mangés par les flammes. Elle a subi de graves brûlures. Mais tout ce qu’elle a en elle se voit sur son expression, dans ses yeux pétillants, dans son sourire touchant. Et que fait Pôle Emploi ? Il décide pour elle que ce métier-là, elle ne l’exercera pas.
J’espère que la personne qui s’est permis cette boulette aura pris conscience ensuite de son erreur et de son manque de professionnalisme.