Le syndrome de l’imposteur

On peut définir le complexe de l’imposteur comme le sentiment de manque de légitimité qui perdure alors que les faits prouvent la pertinence de la personne concernée au poste qu’elle occupe. Il s’agit d’ un traumatisme interne qui se manifeste par un manque de confiance en soi chronique, par lequel la personne a le sentiment qu’elle fait preuve de malhonnêteté intellectuelle.
Pour être schématique, la personne croit qu’elle n’est pas réellement performante, compétente ou intelligente durant ses études mais qu’elle en donne l’impression.Des sentiments et des pensées assez répandus qui pourraient caractériser le syndrome de l’imposteur sont : « je ne suis pas sincère » ; « mes amis de classe et mes professeurs vont découvrir que je n’ai pas vraiment pas ma place ici » ; « la sélection a été mal faite » etc. Les sentiments de l’imposteur peuvent se diviser en 3 sous-catégories :
  1. Sentiment d’être un simulateur : il s’agit de la croyance que l’on ne mérite pas son succès ou le poste que l’on occupe et que d’une certaine façon d’autres collaborateurs ont été trompés. Ceci va de pair avec la peur d’être « découvert », « démasqué ». Les personnes qui nourrissent ce genre de sentiments se reconnaissent dans des affirmations telles que : « je peux donner l’impression que je suis plus compétent qu’en réalité » ; « j’ai souvent peur que d’autres ne se rendent compte de mon manque flagrant de connaissances ».
  2. Attribution de son succès à la seule chance : un autre aspect du syndrome de l’imposteur est la tendance à attribuer sa réussite personnelle au hasard ou à toute autre raison extérieure à soi plutôt qu’à ses propres capacités intrinsèques. Une personne qui nourrit ce genre de sentiments va se référer à sa réussite en disant « j’ai juste eu de la chance cette fois » ; « coup de bol » en craignant de ne pas avoir la même fortune une prochaine fois.
  3. Minimisation de l’importance du succès. Le 3eme aspect est une tendance à réduire l’impact de sa réussite. Un individu dans cette logique va rabaisser la valeur d’une de ses réalisations en disant : « ce n’est pas grand chose », « ce n’était pas un gros projet ». Par exemple, la personne va minimiser le fait qu’elle a du succès dans une organisation au sein de laquelle réussir est très difficile. Ou alors elle va dire : « j’y suis arrivé parce que c’est un exercice facile ». Ou alors l’individu a des difficultés à recevoir des compliments.
Photo Lucas Pintor 20 décembre 2014

Photo Lucas Pintor
20 décembre 2014

 

Qui est susceptible de présenter le syndrome de l’imposteur ?
Ce syndrome caractérise des personnes qui réussissent largement au-delà de la moyenne. Ce qui rend le syndrome de l’imposteur un peu différent du concept du déficit d’estime de soi, parce qu’il y a une différence entre l’accomplissement réel et le ressenti de la personne par rapport à cet accomplissement, ce qui peut ne pas se produire dans le cas d’un manque d’estime de soi. Des personnes exerçant des professions aussi variées que l’éducation, les sciences sociales, les sciences académiques, le théâtre, peuvent toutes développer ce sentiment d’imposture.

Alors que l’on attribuait à l’origine ce syndrome aux femmes, des études récentes ont prouvé qu’une même proportion d’hommes présente les caractéristiques de ce syndrome.

Des comportements, croyances, des messages directs ou non que nous avons reçus de nos parents ou autres modèles dans les premières années de la vie peuvent avoir contribué à développer ce sentiment d’imposture. Certaines situations familiales et certaines dynamiques tendent à favoriser les sentiments d’imposture : quand le succès et la carrière entrent en conflit avec les attentes de la famille en matière de genre, race, religion ou âge de la personne, des familles qui imposent des standards qui ne sont pas réalistes, des familles qui sont très critiques, des familles qui sont traversées de conflits et de colère.

Des chercheurs identifient deux types dominants de dynamiques familiales susceptibles de contribuer aux sentiments d’imposture, même s’il en existe probablement d’autres.

Les étiquettes familiales : plusieurs enfants d’une même famille peuvent porter une identité ou une étiquette différentes. Par exemple, certaines familles décrètent avoir en leur sein un « enfant intelligent » et un « enfant sensible ». Au fur et à mesure que les enfants grandissent, ces familles ne modifieront pas leur perception de chacun des enfants, quoi qu’ils fassent. C’est ainsi que l’enfant sensible, même s’il a de meilleurs résultats ou récompenses, ne sera pas reconnu pour son intelligence. Ceci peut conduire cet enfant à douter de son intelligence et à croire que la famille a raison alors même que tout est en contradiction avec ces étiquettes plaquées.

Les messages familiaux de supériorité : d’autres familles peuvent soutenir leur enfant tant que la famille et la personne pensent qu’elle est supérieure ou parfaite. Si le sujet grandit et rencontre des situations où il est mis au défi, il peut mettre en doute les perceptions de ses parents et avoir besoin de cacher ses difficultés, afin de ne pas bousculer l’image que la famille a forgée de lui. Avec pour résultat que des difficultés banales que cette personne rencontre peuvent la conduire à penser que ses prestations ne sont que passables, voire médiocres.

Le lien entre les sentiments d’imposture et la réussite

Les sentiments d’imposture sont en relation avec une incapacité à internaliser les réussites passées et présentes. Vous avez beau réussir, cela ne diminuera pas la façon dont vous vous sentez et cela n’atténuera pas votre sentiment d’illégitimité.

Craindre la réussite : des personnes présentant des symptômes du sentiment d’imposture peuvent avoir tendance à sur-internaliser l’échec. Celui qui se sent imposteur peut fuir la réussite,  la responsabilité et la visibilité connexes. Puisque réussir ne fera qu’augmenter le conflit entre le ressenti intérieur et les perceptions venues de l’extérieur.

L’impératif à ne pas rater : il peut y avoir une immense pression à ne pas rater, simplement pour ne pas être « mis à nu ». Ceci conduit à ne pas être capable de profiter de ses réussites et de les internaliser.

Le syndrome de l’imposteur et les femmes de talent

Même si les sentiments d’imposture peuvent être présents chez chacun de nous, on a découvert qu’ils sont associés avec le talent et surtout présents chez des femmes de talent. D’après des expériences sur des étudiants dans une université américaine, les valeurs, les attentes et l’environnement social sont un terreau fertile pour les sentiments d’imposture.

Comportements et croyances perpétuant les sentiments d’imposture

Persévérance : les femmes qui ont du talent travaillent souvent dur pour éviter que l’on ne découvre qu’elles sont en » imposture ». Cet acharnement provoque encore plus de succès et de compliments, ce qui ne fait que renforcer les sentiments d’imposture et les peurs d’être « mise à nu ».

Sentiment de manquer de sincérité : une femme qui ressent des sentiments d’imposture tente souvent de donner à ses supérieurs ou ses enseignants les réponses dont elle sait qu’elles sont attendues d’elle, ce qui lui donne encore plus l’impression de manquer de sincérité.

Recours à la séduction : en lien avec ce qui précède, des femmes talentueuses utilisent souvent leur intuition et leur charme pour obtenir l’approbation et les compliments de leurs superviseurs et cherchent à établir des relations avec leurs supérieurs pour les aider à améliorer leurs compétences intellectuelles et leur créativité. Quoi qu’il en soit, lorsque le maître fait preuve de reconnaissance, naît l’impression que cette dernière est due à la séduction et non à des capacités avérées.

Evitement de la marque de confiance : une autre façon par laquelle le sujet féminin fait perdurer ses sentiments d’imposture consiste à éviter toute confiance en ses propres capacités. Une femme ayant maille à partir avec le sentiment d’imposture peut penser qu’en fait si elle se met à croire en son intelligence et ses compétences elle pourrait être rejetée par d’autres. C’est pourquoi elle va se persuader qu’elle n’est pas intelligente et qu’elle ne mérite pas de réussir, pour éviter tout rejet.

Comment vivre avec le sentiment d’imposture

Si vous nourrissez ce genre de sentiments, cela ne veut pas dire que vous les aurez toute votre vie. Il existe des étapes à franchir afin de réduire ces impressions et y faire face lorsque l’on a à les affronter.

Le soutien : être capable de partager ces sentiments pour comprendre que vous n’êtes pas seul et pour vous confronter à la réalité.

L’identification de ces sentiments : prenez conscience, des situations ou des moments où vous vous mettez dans cette disposition mentale dans laquelle vous vous trouvez dans un sentiment d’imposture. La prise de conscience est le premier pas vers un changement, et ce n’est pas évident car bien souvent nous ne nous rendons pas compte de nos pensées automatiques.

Les pensées automatiques : elles peuvent être définies comme des pensées sous-jacentes, restées sans réponses, qui affectent la façon dont l’on perçoit un événement ou une situation. Ces pensées sont parfois tellement automatiques qu’elles arrivent très rapidement, sans même monter jusqu’à la conscience … et pourtant elles affectent la perception. Un bon exemple d’une pensée automatique impactant le syndrome de l’imposteur serait : « je ne suis pas suffisamment doué ». Cette pensée sous-jacente peut conduire à penser que « tout le monde est plus intelligent que moi » ou « il y a eu une erreur lors de la sélection des candidats ».

Faites votre propre auto-critique. Questionnez ces pensées automatiques et ces sentiments d’imposture et essayez de vous reconnecter à des pensées plus objectives.

Comprendre la différence entre les sentiments et la réalité : certaines personnes tendent à s’imaginer que puisqu’elles pensent quelque chose si intensément, c’est que cela ne peut qu’être la réalité. « si je me sens si stupide ça doit être parce qu’en effet je suis stupide ». Lorsque vous vous surprenez à penser de cette façon, changez votre façon de formuler en disant « le fait que je me sente stupide ne veut pas dire que je le suis réellement ».

Dessin : Liesbeth van der Weide

Dessin : Liesbeth van der Weide

Ceci dit : il est d’autant plus difficile de changer lorsque l’on doute de ses propres capacités. J’en connais un rayon. Mais ça, c’est une autre histoire …

Travailler longtemps sous stress augmente les risques de faire un AVC

D’après une récente étude scientifique (www.mirror.co.uk), travailler 55 heures hebdomadaires font entrer les individus dans une zone de danger augmentant considérablement le risque d’AVC et d’infarctus

Des experts ont découvert que des personnes soumises à une durée de travail de cet ordre présentent 33% de risques de plus de faire l’objet d’un AVC que les salariés aux 35-40 heures. Et augmentent de 13% le risque de développer une maladie coronarienne.

Cette étude, la plus importante dans ce domaine, réalisée en juin 2015, analyse les résultats de 25 enquêtes impliquant plus de 600 000 personnes aux Etats-Unis, en Australie et en Europe.
A la tête de cette étude, le Professeur Mika Kivimaki, de l’University College de Londres, déclare : « le fait de croiser les données de toutes les études disponibles sur le sujet nous a permis d’étudier la corrélation entre le nombre d’heures de travail et le risque de maladies cardiovasculaires avec bien plus de précision que jusque-là ».En 2012, 146 550 patients domiciliés en France ont été hospitalisés pour maladie cérébro-vasculaire. Pour 105 310 patients (72 %), le diagnostic principal était un AVC avéré. L’AVC représente la troisième cause de mortalité dans notre pays.

On ne sait pas bien pourquoi travailler de longues heures représente un tel danger, mais les auteurs suggèrent l’augmentation du stress avec son cortège de comportements dommageables à la santé tels que la consommation excessive d’alcool/tabac, une alimentation déséquilibrée et un manque d’exercice. Lorsque l’on travaille 11 heures par jour, il ne reste pas beaucoup de temps pour faire autre chose que de manger et dormir.

Je rappelle qu’en France, que l’on soit un salarié mensualisé ou au forfait, il est interdit de travailler plus de 10H par jour et qu’il faut respecter 11 heures d’amplitude entre 2 jours de travail. Celui qui travaille 11H par jour, pour peu qu’il ait 2H de transport, n’a plus du tout le temps à consacrer à des activités personnelles et surtout à sa famille.
Il n’en demeure pas moins que le Dr Mike Knapton, de la British Heart Foundation, souligne qu' »il faut approfondir la recherche pour comprendre et traiter les mécanismes biologiques susceptibles d’augmenter le risque d’AVC et de maladie coronarienne chez les personnes travaillant beaucoup (trop) ».
Et d’ajouter que les médecins doivent souligner l’impact sur le risque cardiovasculaire auprès de leurs patients dont ils savent qu’ils sont de gros travailleurs. Même si, comme le remarque le Dr Tim Chico, un expert en cardiologie de l’Université de Sheffield, « il est difficile, voire impossible pour bien des individus, de réduire leurs heures de travail »La plupart d’entre nous pourrions rester assis moins longtemps, augmenter notre activité physique et améliorer nos habitudes alimentaires tout en travaillant, ce qui pourrait être encore plus important que le temps passé au travail lui-même.

Il s’agit donc de réfléchir à la question de l’environnement de travail, comment le modifier pour promouvoir des comportements favorables à la santé afin de réduire les AVC même lorsque l’on travaille de longues heures.

Un AVC : de quoi s’agit-il ?
Il s’agit d’une urgence vitale qui se traduit par un déficit d’alimentation en sang d’une partie du cerveau. Il est essentiel d’agir très rapidement, les chances de récupérer étant proportionnelles à la rapidité d’intervention.


Dans 85% des cas, ces accidents sont dus à la présence d’un caillot sanguin logé dans le cerveau ou à une hémorragie due à un vaisseau sanguin affaibli qui éclate dans le cerveau.

Signes d’alerte
Le visage peut se paralyser pour moitié. La personne peut ne plus soulever l’un de ses bras, son débit de paroles est modifié. Auquel cas, appelez le 15.

Pour plus d’informations : consulter le site de l’Inserm.
Le détail des données statistiques de cette étude sont disponibles sur le journal médical The Lancet.

Photos Lucas Pintor – Whangarei Falls, NZ

Formatrice consultante

Intelligente
Pertinente
Impertinente
« Poil à Gratter »Odile
Drôle
Sensible
Douée
Pédagogue
Empathique
Généreuse

Tu étais tout cela à la fois et tellement d’autres choses encore …
Je te rends hommage à chaque fois que je délivre une formation sur les RPS. Je pense à l’ironie du sort en faisant cela.

"Mystery" - Emmy Verschoor Acrylique et encre sur papier 18x27 cm

« Mystery » – Emmy Verschoor
Acrylique et encre sur papier 18×27 cm

Tu manques à beaucoup de confrères, Odile. Du Sycfi et d’ailleurs. Et tu me manques.

Reprendre le travail après un burnout

Source : http://www.stressdirections.com

Troublant. Patrick Drouin

Troublant.
Patrick Drouin

Si lors de votre prise de poste, au début, il vous semble tenir la solution à tous vos problèmes, si vous développez de fortes attentes, d’immenses espoirs, et si ce que vous avez envie de faire par-dessus tout c’est de vous surpasser au travail, méfiance. Vous êtes candidat au stress professionnel le plus insidieux et le plus dramatique qui soit, le burnout, c’est à dire un état d’épuisement physique, émotionnel et mental provoqué par des aspirations irréalistes et des objectifs illusoires et impossibles à atteindre.

Le risque de faire un burnout augmente drastiquement en fonction de la personnalité de l’individu, de l’environnement de travail et de la nature du poste. Si êtes doté d’une forte capacité de travail et que vous êtes à 110% en permanence, si vous êtes idéaliste, auto-motivé, orienté résultats par tous les moyens, acharné, persévérant, vous êtes un candidat potentiel. La même chose vaut si vous êtes perfectionniste au point de vous fixer des repères et des exigences irréalistes. Dans un emploi à faible reconnaissance, où les rétributions sont sans rapport avec le travail bien fait, si votre métier est un métier de contact ou un métier à échéances à enjeu, le passage du stade de candidat possible à candidat probable au burnout est quasiment irrémédiable. La route vers le burnout est pavée de bonnes intentions. En soi il n’y a rien de répréhensible à être idéaliste, travailleur, perfectionniste et de vouloir réussir du fait d’une grande motivation et d’un fort respect de la valeur travail, et il n’y a aucune objection à avoir des ambitions et des attentes. On le sait, ces traits de caractère sont jugés comme remarquables et sont valorisés dans notre culture. Là où ça dérape, c’est lorsque l’on touche au manque de réalisme. Des ambitions et des exigences professionnelles excessives envoient tout droit la personne vers la frustration et l’échec. La personnalité du candidat au burnout le ou la maintient dans un effort résolument intense jusqu’à l’implosion.

Le burnout procède par étapes qui se mélangent et se combinent entre elles de façon si peu perceptible que la victime se rend rarement compte ce qu’il lui arrive, même très tard.

Voici les étapes communément décrites pour un burnout :

La lune de miel

Pendant cette phase, tout est extraordinaire. La personne a une énergie sans bornes et son enthousiasme rend tout possible. L’individu adore son poste et réciproquement, elle a l’impression que ce poste va répondre à tous ses besoins et désirs et résoudre toutes ses difficultés. L’individu est enchanté aussi bien par ce métier, ses collègues que l’entreprise où il évolue.

La prise de conscience

La lune de miel fait place à l’étape qui consiste en la prise de conscience du fait que les attentes initiales étaient irréalistes. Le poste n’évolue pas de la façon imaginée et rêvée, il ne répond pas à tous les besoins, les collègues et l’entreprise sont de moins en moins parfaits, les récompenses et la reconnaissance sont souvent les grands absents.

Alors que désillusion et déception enflent, l’esprit de l’individu devient embrouillé. Quelque chose  ne va pas, mais impossible de mettre le doigt dessus. En l’espèce la personne se met à travailler encore davantage pour transformer son rêve en réalité. Mais travailler plus ne change rien et une fatigue de plus en plus intense s’installe, accompagnée de lassitude et de frustration. L’individu remet en question ses compétences, sa légitimité et commence à perdre sérieusement confiance en elle.

Le Brownout (chute de tension)

La tension baisse, et en corollaire l’enthousiasme initial et l’énergie cèdent la place à une fatigue chronique, une propension à être irritable. L’alimentation, le sommeil se modifient et l’individu se réfugie dans des comportements de fuite de type excès de boisson, drogues, sorties nocturnes ou frénésie acheteuse. On assiste à une perte de faculté à prendre des décisions, à une productivité en chute libre. La qualité du travail se détériore et collègues et supérieurs hiérarchiques ne manquent pas de le remarquer.

S’il n’y est pas mis fin, le brouwnout glisse sans remords vers ses ultimes étapes. L’individu est de plus en plus frustré et en colère et attribue aux autres la cause de ses difficultés. Il devient cynique, détaché et ouvertement critique envers l’organisation, ses supérieurs et ses collègues. Il fait l’objet d’une dépression, d’une angoisse et d’un mal-être physique. Les drogues et l’alcool viennent ajouter au problème.

Le Burnout complet

Sauf prise de conscience de dernière minute qui puisse mettre fin au processus ou à moins que quelqu’un n’intervienne, le browout évolue inexorablement vers un burnout complet. La caractéristique de cette étape finale est le désespoir. Ceci peut durer dans le meilleur des cas quelques mois mais la plupart du temps il est question de trois ou quatre ans. Le sujet se sent accablé par un sentiment d’échec et par une perte dévastatrice d’amour propre et de confiance en soi. Dépression, solitude et vide absolu sont le lot de la personne en burnout.

La vie a perdu tout son sens et on ressent un pessimisme paralysant envers le futur, le sentiment d' »à quoi bon ». La personne évoque l’idée de « simplement partir et s’extraire de là ». Elle est épuisée physiquement et mentalement. Des dépressions physiques et mentales sont à craindre. Suicide, AVC, infarctus sont assez fréquents à ce stade ultime de ce qui au début n’était qu’attentes et espoirs démesurés, énergie, optimisme et enthousiasme.

Le phénomène Phénix

Vous pouvez renaître, façon Phénix, des cendres du burnout, mais cela prend du temps. Tout d’abord, il faut du repos et de la détente. Ne pas emporter de travail chez soi, de toutes manières dans un tel état le travail ne se fait pas, et donc vous vous sentiriez de plus en plus coupable et paresseux, alors que vous êtes malade.

Il s’agit d’accepter son attitude, sa colère, son manque de discernement, sa frustration, sa déception, sa dépression, son angoisse, son manque de légitimité et son échec supposés comme faisant partie intégrante du tableau du burnout et cette acceptation est une étape nécessaire à la guérison. Il peut être utile de trouver quelqu’un avec lequel évoquer sa détresse. Un compagnon, un ami de longue date, un coach, un thérapeute. Il est important que chacun comprenne que l’idée est simplement de parler et non pas de trouver la solution pour la personne impactée.

Revenir au travail avec un burnout implique que l’on réajuste ses attentes vis à vis du poste que l’on va reprendre et que l’on revoie ses objectifs. Il s’agit de réviser ses aspirations et ne pas tenter d’être ou de faire ce qui est dicté par autrui, qui est le meilleur moyen de continuer à se sentir frustré et à alimenter le burnout.

Revenir au travail suppose que l’on ait pris du repos, du repos encore et encore

Forêt de Coye Patrick Drouin

Forêt de Coye
Patrick Drouin

Le plus important : il s’agit de trouver un équilibre de vie, d’investir davantage en son temps libre, sa famille, son cercle d’amis, ses activités sociales et ses loisirs. Il faut se déployer de façon à ce que le travail n’ait plus cette influence omniprésente et cet impact délétère sur l’image et la confiance en soi.

 

Travailler vite, travailler bien, travailler trop …

LA SURCHARGE DE TRAVAIL  REND IMPRODUCTIF
(d’après une étude du Dr Travais Bradberry)

Etre débordé a quelque chose à voir avec l’honneur. La pensée ambiante définit une corrélation entre surcharge, performance et forte capacité de travail. Alors que la surcharge de travail a un impact négatif sur la productivité.

Penser à une personne très occupée, évoque instantanément l’image d’un téléphone qui sonne, d’une avalanche d’emails et d’un planning sur le point d’éclater avec sa cohorte de projets importants et annexes qui se télescopent. Une telle situation se solde par un comportement multitâches et par des interruptions très dommageables à la productivité.

“Méfions-nous de la stérilité d’une vie sur-occupée” -Socrate

David Meyer, de l’Université de Michigan, a récemment publié une étude qui met en évidence que le fait de passer d’une activité non finalisée à une autre augmente le temps nécessaire à terminer chacune des deux activités de 25%. D’après Meyer, faire plusieurs choses simultanément ralentit le travail. Les interruptions et digressions sont dommageables dans la capacité de chacun à intégrer et traiter l’information.

Microsoft, qui a décidé d’étudier ce phénomène auprès de ses salariés, a découvert qu’il leur fallait pas moins de 15 minutes pour se remettre sur leurs projets importants (rédaction de rapports, codage informatique) à chaque fois qu’un mail, un appel ou un sms les tirait de leur concentration. Ce n’est pas le traitement des messages entrants qui leur prenait 15 minutes, mais leur irruption qui conduisait les employés, du coup, à se laisser aller à d’autres tâches, entre autres surfer sur la toile pour le plaisir.

La facilité avec laquelle les gens se laissent distraire et le temps important requis pour qu’ils retournent à leur travail sont surprenants, dit Eric Horvits, responsable de recherche scientifique chez Microsoft en charge de cette étude. « Si c’est à ce point chez Microsoft, aucune raison que ce ne soit pas la même chose ailleurs ».

Indépendamment des interruptions possibles, le fait d’être surchargé de travail réduit la productivité car un goulet d’étranglement, logé dans le cerveau, empêche de se concentrer sur deux choses simultanément. Tenter de faire deux choses à la fois fait que l’on se heurte au manque de capacité du cerveau à réussir pleinement les deux actions. Dans une étude déterminante, René Marois et son équipe de l’Université Vanderbuilt a utilisé des IRM’s pour prouver que ce goulet d’étranglement est une cause purement physique.

“Nous nous imaginons que nous avons ce cerveau pour faire plus que ce qu’il est possible », indique Marois.

Nous adorons tellement être multitâches que nous pensons être plus productifs, alors même que notre cerveau n’en est pas capable, d’un point de vue purement physiologique. Peu importent nos croyances, obtenir le meilleur niveau de productivité suppose de faire des plannings de manière à pouvoir nous concentrer efficacement sur la tâche en cours, à l’exclusion de toute autre.

La pratique de la pleine conscience développe la capacité à se concentrer en augmentant la densité du cerveau dans le cortex limbique antérieur. Le mode multitâches vient en opposition au fonctionnement de cette zone critique du cerveau. Des chercheurs de l’Université de Sussex ont comparé le temps que des individus passent sur plusieurs activités simultanément (regarder la télé tout en rédigeant des sms) en étudiant leur cerveau sous IRM. Ils découvrirent que ceux qui multiplient les tâches présentent une moindre densité de leur cerveau dans la zone limbique ; tout se passe comme si être occupé constamment, en particulier à faire plusieurs choses simultanées, entraînait le cerveau à être moins affuté et productif.

Ces découvertes ne devraient pas vous être totalement étrangères, nous avons tous vécu l’effet déconcentrant qu’entraînent plusieurs tâches à la fois lorsque l’on est très occupé. Alors pourquoi continuons-nous à le faire ?

Des chercheurs de l’Université de Chicago ont la réponse. Ils ont  découvert que la croyance associant le fait d’être très occupé et de travailler beaucoup au succès est tellement répandue et ancrée qu’en réalité l’inactivité fait peur. Une étude récente utilise l’expression « aversion de l’oisiveté » pour décrire la façon dont les individus sont attirés par le fait d’être très occupés, sans se préoccuper de l’impact négatif sur leur productivité.

Ces chercheurs ont également mis au jour le fait que nous utilisons la surcharge de travail pour nous préserver de notre propre paresse et par peur d’échouer. Nous consommons du temps de qualité à faire des choses qui ne sont ni utiles ni importantes parce que cette surcharge nous fait nous sentir efficaces. Par exemple, le fait de répondre à des mails sans intérêt tout en sachant qu’un projet à enjeu est en instance et qu’il faut le terminer pose question. C’est dur, mais il est nécessaire de sortir du déni lorsque l’on recourt à des activités insignifiantes pour se protéger de la flemme ou de la peur. Cela veut dire quelque chose.

Merci à Patrick Drouin

En résumé

Nous voulons tous être très occupés malgré le fait que cela aille à l’encontre de notre productivité. La réalité et la science montrent toutefois qu’il est impératif de revoir son rythme pour sa propre santé. A défaut, les conséquences peuvent être sévères.

Je pense à notre génération Y et Z qui ne sait faire que ça : étudier ses cours en regardant ses sms, diner en amoureux en téléphonant …

Etes-vous accro au travail ?

Source : http://www.sortirdutravail.org

Aujourd’hui jour de flemme, je me contente de reprendre un extrait d’un article intéressant qui montre comment on porte en germe son propre burnout. Les questions sont à replacer dans un contexte où la crise et  la peur réelle de perdre son travail et de se trouver en difficultés est susceptible de créer des vocations.

Voici traduites les vingt questions des Workaholics Anonymous américains. Si vous répondez oui à trois ou plus de ces questions, il se peut que vous ayez une dépendance au travail.

  1. Etes-vous plus enthousiaste pour les activités professionnelles, que familiales ou autres?
  2. Y a-t-il des moments dans lesquels vous pouvez avancer très vite dans votre travail, et d’autres moments où vous n’y arrivez pas?
  3. Emmenez-vous votre travail au lit avec vous, le soir? Les weekends? Pendant les congés?
  4. Votre travail est-il l’activité que vous aimez le plus, et dont vous parlez le plus?
  5. Travaillez-vous plus de 40 heures par semaine?
  6. Transformez-vous vos hobbies en activités lucratives?
  7. Endossez-vous l’entière responsabilité envers les résultats de votre travail?
  8. Votre famille et vos amis ont-ils abandonné l’idée de vous voir arriver à l’heure?
  9. Faites-vous régulièrement des heures supplémentaires parce que vous craignez qu’autrement votre travail ne sera pas fini?
  10. Sous-estimez vous le temps nécessaire pour un projet, avant de vous dépêcher à la fin pour le finir?
  11. Pensez-vous qu’il soit acceptable de travailler de longs horaires, tant qu’on aime ce qu’on fait?
  12. Vous arrive-t-il de perdre patience avec les personnes qui ont d’autres priorités, extra-professionnelles?
  13. Craignez-vous de perdre votre poste, ou de passer pour un perdant, si vous ne travaillez pas assez dur?
  14. L’avenir est-il pour vous une source d’anxiété constante, y compris lorsque tout va bien?
  15. Dans toutes les activités, vous impliquez-vous avec énergie et compétitivité, y compris les activités en dehors du travail, comme le jeu?
  16. Cela vous énerve-t-il quand quelqu’un vous demande d’arrêter de travailler pour faire autre chose?
  17. Vos longs horaires ont-ils fait du mal à votre famille, et à vos proches?
  18. Pensez-vous à votre travail quand vous êtes au volant, avant de vous endormir, ou pendant que d’autres vous parlent?
  19. Travaillez-vous, ou lisez-vous, durant vos repas?
  20. Pensez-vous que plus d’argent résoudra les problèmes de votre vie?

Quand je lis tout ça je me dis que je dois des excuses à mon fils, à mes amis … A tous ceux que je laisse au second plan … par facilité peut être aussi, après tout, être accro au travail n’est pas une addiction mal vue …

 

Photo Dominique Pinat

Photo Dominique Pinat

Au fait, quels sont les avantages à être freelance ?

Depuis 18 mois que j’ai créé mon activité, et je n’ai jamais été autant chassée pour le secteur marchand. Plusieurs fois. Pour certaines compétences « rares » dont par hasard je dispose. Par le biais de mon réseau. Pour m’associer à des projets. Pour partager mon savoir-faire. Par des chasseurs ayant pignon sur rue.

Alors que le chômeur n’intéresse personne, ce dernier se met en freelance, parce qu’il a quelques scrupules, ne veut pas vivre sur le commun, il redevient l’objet de convoitises.Et c’est tant mieux.

Pour le moment j’ai toujours dit non.

Photo Pascal Thénault

Photo Pascal Thénault

Quand j’en parle autour de moi on me dit : « tu es folle, que fais-tu de la sécurité, de la protection sociale, tu es inconsciente, tu as un enfant à charge. Accepte ». Entre autres.

Oui, en effet, pourquoi quand j’ai quitté mon dernier emploi de salariée avais-je autant la trouille de me mettre en entrepreneur de soi et pourquoi aujourd’hui ai-je la même crainte à revenir en situation de subordination ?

Quels sont les avantages de la « liberté » ?

  • la possibilité de faire un travail éthique, à savoir pouvoir adopter une posture en accord avec soi. Toujours. Sans compromis ni compromission
  • pas de comptes à rendre à une hiérarchie (si ce n’est le percepteur)
  • une importante autonomie procédurale
  • le choix de dire « m… » à un client qui ne vous vaut pas (je rigole) ou qui ne vous convient pas ou qui ne vous comprend pas (ça existe) ; à moins que ça ne soit le contraire
  • l’impératif de toujours se remettre en question, en tant qu’individu et en tant que professionnel
  • la conscience que rien n’est jamais acquis et que justement c’est ça qui est bien
  • la diversité des situations, des problématiques à traiter. Celles d’hier ne sont pas celles de demain, en plus. Ca force à une agilité sans faille
  • l’intérêt des rencontres très diverses, toujours enrichissantes
  • L’impératif de  toujours rester en veille, de s’informer, progresser, de garder le contact avec la réalité du terrain pour la transposer dans sa propre activité
  • l’agilité intellectuelle qui vous pousse dans un cercle vertueux
  • un excellent retour sur investissement en termes de connaissances

J’oubliais : la jouissance à se dire : « yes ! le client me demande autre chose, le client est content, le client revient ». Et puis en écho le plaisir de voir le compte en banque crédité de la somme négociée avec le client. Concrètement, une corrélation très étroite entre la qualité de votre travail et sa rémunération, aucun brouillage, un lien de cause à effet sans discussion possible. Le chemin est tout court, pas d’intermédiaire qui se sert au passage.

Et en même temps :

  • difficile d’avoir un weekend à soi car il y a toujours le client qui vous a commandé une mission à faire pour la veille et que vous ne voulez pas décevoir
  • difficile d’avoir la quiétude d’esprit car votre agenda est très chargé et il faut pourtant du temps pour terminer la session de formation commencée et dont vous voyez l’échéance s’approcher irrémédiablement, difficile de dégager du temps indispensable pour se ressourcer auprès de ses pairs, réseauter, assister à des conférences, voir du monde …
  • difficile de prioriser, compte tenu de tout ce qui précède. Personne ne décide à votre place mais vous devez prendre la décision la plus pertinente, ce qui est par ailleurs tout relatif en fonction de l’époque, des circonstances, des nécessités économiques, d’un collègue qu’on souhaite aider … On procède par itérations successives. Je ne suis pas sûre que ça soit une prérogative réservée à l’entrepreneur de soi ; les cadres des grandes entreprises se plaignent d’un manque d’autonomie dû à un manque de temps pour prendre la meilleure décision
  • inquiétude constante de « demain » : pas de protection perte d’emploi, pas de compensation monétaire en cas de maladie, pas ce certitude quant à la retraite avec ce qui se dit sur le RSI en ce moment
  • risque de se faire piquer des idées, en particulier quand vous intervenez en tant qu’enseignant/formateur. Quel recours par rapport à votre commettant ?
  • impératif (je l’ai vécu) de « tenir » avec une grippe et 39°C de fièvre sans pouvoir faire semblant, parce qu’en face vous avez un client qui vous a acheté une formation et que vous devez l’assurer. Coûte que coûte alors que votre place est dans votre lit.
  • impératif de fournir une énergie et une concentration inépuisables. Avec le sourire (dans une formation sur les RPS je parle de « conflits de valeurs »). Avoir la pêche.

Alors, repartir en entreprise ? Redevenir salarié ? Quel intérêt ?

  • protection sociale (retraite ? J’ai 54 ans) ; oui pour la maladie dans une certaine mesure. Ou le gros pépin auquel tout le monde pense … pour les autres
  • possibilité de faire une journée « en faisant semblant » ; quand on a un peu d’amour-propre ce n’est pas tellement satisfaisant
  • avantages divers inégaux en fonction des secteurs : tickets restau, mutuelle, prévoyance, assurance RC, tout ce que le freelance doit financer lui même (ce qui justifie des honoraires plus élevés, quoique)
  • accès (de moins en moins) à de la formation présentielle plutôt que d’aller au-devant de la formation de façon proactive et souvent virtuelle ; formation sur étagères peut être mais tellement moins consommatrice d’énergie
  • Reconnaissance sociale : « vous en êtes », surtout si vous intégrez une entreprise « connue » (pas forcément pour les bonnes raisons).

Alors, que faire ? Répondre aux sirènes de l’amour-propre en se disant « j’ai été chassée, ouah, j’y vais » ? Rester en libéral, entreprise avec son lot de solitude, de doute mais permettant chaque matin de se dire : ce que j’ai gagné je le dois à ma compétence, ma relation personnelle client, ma personnalité, ma différence … Et à moi-même uniquement.

Qu’est-ce qui fait qu’un freelance reste freelance ? Par choix ? Et donc quelqu’un qui retourne en entreprise donnerait-il par là l’aveu que son activité freelance, loin d’être un choix l’a été par défaut ? Est-ce si simple ?

Je suis aujourd’hui face à un choix ; et j’ai du mal à trancher. Si : mon fils a eu un sourire jusqu’aux oreilles quand je lui ai dit que j’étais en bonne voie pour un CDI. Mais décide-t-on de son avenir pour rassurer son fils ?

La question, en ce qui me concerne, reste entière

Le handicap est dans le regard des autres

C’est un petit bout de bonne femme toute menue, dans sa petite robe à bretelles et ses ballerines, qui se présente à nous, intimidée, mercredi matin dernier.

Nous ce sont Maïté et moi, qui officions en tant que jury pour l’épreuve finale destinée à valider pour 13 candidats un titre professionnel d’employé administratif et d’accueil (je crois que c’est le nom exact du titre).

Pour en arriver là, Floriane a travaillé d’arrache-pied pendant 17 mois, dans un centre de reconversion professionnelle, pour pouvoir exercer un nouveau métier suite à un accident de vie. Un accident de pas de bol et un accident que l’on ne peut pas ne pas remarquer. 17 mois pas toujours faciles, au sein d’une « classe » de personnes dont le point commun est la RQTH (reconnaissance en qualité de travailleur handicapé). Elle est partie de rien pour apprendre un métier qui soit compatible avec les contraintes infligées par sa différence.

Bien sûr, elle se présente à nous et elle est stressée. Les épreuves écrites, produites l’avant veille et destinées à valider un bon niveau de compétences en la matière et à garantir une employabilité immédiate, sont devant nous, sur le bureau. Elles sont excellentes. Nous le lui disons d’emblée, pour la détendre.

Nous lui demandons de nous parler de ce métier qu’elle s’apprête à exercer, de son stage, de ce qu’elle en a retiré et son visage s’illumine. Elle rayonne. Son sourire est éclatant. Elle s’exprime avec pertinence, le mot juste, et, faisant fi de sa timidité nous regarde bien en face. Le boulot, l’avenir, c’est sérieux et elle sent que nous jury nous attendons d’elle cette posture- là. Une posture d’une professionnelle de l’accueil, qu’il soit physique, téléphonique, et une bonne compétence dans la réalisation des travaux administratifs indispensables dans toute collectivité de travail.

Assez vite nous lui faisons comprendre qu’elle a fait le bon choix dans ce nouveau métier pour lequel elle semble parfaitement bien à sa place. Nous l’encourageons à tout de suite chercher une place, pourquoi pas en intérim, août et son cortège de titulaires à remplacer arrive à grands pas, elle est brillante, cette jeune Floriane, brillante et déterminée. Elle n’est pas encore tout à fait convaincue qu’elle dispose d’un vrai potentiel mais, passionnée par ce métier qu’elle a découvert, elle veut en découdre.

Et elle nous dit en passant : « merci de m’avoir encouragée ; Pôle Emploi m’a refusé la formation d’agent d’accueil« .

Quand on regarde plus de 2 minutes et demi, on a déjà oublié la souffrance qui a sculpté son visage, les douleurs qu’elle a dû subir pendant des mois, des années ; on ne voit plus que son sourire, son enthousiasme, sa volonté de travailler, de réussir et de se dépasser. On voit que dans une entreprise elle sera une excellente hôtesse d’accueil.Et elle saura évoluer, grandir encore.

Le visage et le scalp de Floriane ont été mangés par les flammes. Elle a subi de graves brûlures. Mais tout ce qu’elle a en elle se voit sur son expression, dans ses yeux pétillants, dans son sourire touchant. Et que fait Pôle Emploi ? Il décide pour elle que ce métier-là, elle ne l’exercera pas.

J’espère que la personne qui s’est permis cette boulette aura pris conscience ensuite de son erreur et de son manque de professionnalisme.

DSC_0004Place Ducale, Charleville Mézières – Photo Pascal Thénault

Citation

Une déception, c’est une attente non exprimée

Photo Pascal Thénault

Photo Pascal Thénault

Le cadre et l’alternant

A priori pas tellement de points communs. Et pourtant. L’alternant, que j’ai en cours de RH et/ou de paie, (en Master I ou II) m’explique que pour réussir il « faut » être cadre. Et que pour être cadre il « faut » faire des heures. Qu’un cadre c’est quelqu’un qui est au forfait et donc qu’il peut travailler 15 heures d’affilée si nécessaire. Qu’un alternant, s’il veut réussir, réussir à être cadre, s’entend, doit être visible le soir après 19H.

Affligeant.

N’est pas au forfait qui veut. Un salarié autonome peut très bien être au forfait sans être cadre. Un cadre qui (par définition) a une équipe ou dépend d’un process, n’est pas autonome (et ne peut pas l’être). Il n’a pas tellement de raisons d’être au forfait et d’ailleurs certaines conventions collectives codifient très précisément les niveaux à partir desquels le forfait est susceptible d’être utilisé. Il n’est pas non plus écrit dans le code du travail ou ailleurs qu’être cadre prive l’individu de l’accès à des horaires décents.

Pourtant quand j’engage la conversation avec mes élèves, ils relaient tous le même discours : il faut travailler beaucoup et tard pour être visible et être remarqué. La promotion par la sortie de bureau tardive.

Réflexe typiquement français qui confond longues heures et efficacité et je ne parle même pas d’efficience. En Allemagne, aux Pays-Bas, les pères et mères de famille ont leurs soirées. Que je sache, leur niveau de vie ne s’en porte pas plus mal. Le temps partiel s’y pratique sans complexe sans pour autant entraver la progression de carrière en aucune façon.

Quel est donc ce préjugé qui veut que pour faire carrière il faille travailler (ou faire de la présence) au-delà du légal, alors que de chaque côté de la pyramide des âges, les juniors ont du mal à entrer et les séniors ont du mal à rester ? Comment en sommes-nous arrivés à faire tenir un modèle économique qui fonctionne alors que les salariés travaillent bien au-delà de l’horaire légal ? Comment peut-on accepter que l’organisation s’échafaude sur une seule tranche de salariés, de 28 à 45 ans ?

Je lisais récemment le mémoire de fin de Master I d’une jeune femme qui parle d' »emploi » pour désigner la condition de stagiaire ; et qui explique que la société où elle a effectué son stage compte plus de stagiaires que de permanents. Comment dans ces conditions peut-on espérer progresser, créer de la valeur et surtout financer toutes ces caisses à bout de souffle, au détriment de toute protection sociale ?

Je n’ai pas la réponse ; je continue à demander à mes élèves de cesser de relayer ce diktat de la semaine à 55 heures pour réussir. Mais ils me répondent que pour eux c’est la seule voie pour trouver un emploi et accéder à ce (pour eux encore) mythique statut de cadre. Et où est la place de la performance, dans tout ça ?

DSC_0049Les vaches de Panurge … Photo Pascal Thénault